Notre premier passage d’un poste frontière terrestre se déroule certes sans encombre mais nous réclame une bonne dose de patience. Dès lors, nous sommes pris dans le flot du circuit touristique laotien. Impossible d’y échapper ! Pays le plus pauvre de la région, les autorités de la république démocratique populaire lao, converties au capitalisme suite à la chute de l’URSS, ont très bien pris le pli pour tirer profit de leur beau pays. Notre parcours vers Luang Prabang est donc fléché.


Le départ du « slow boat » est prévu pour 11h30, or nous quittons le poste frontière à 11h45. Pas de panique ! Au vu de l’affluence, deux bateaux vogueront aujourd’hui nous apprend le rabatteur en chef des tuk-tuk stationnés juste à la sortie du poste frontière. Flexibilité. Hors de question de laisser quelques touristes sur le bas-côté. 12h, par chance nous arrivons les premiers sur le second bateau. Les passagers du premier bateau attendent bien sagement. Apparemment ils veulent

faire partir les deux bateaux en même temps. Peut-être au cas où l’un coulerait. Toujours est-il que nous pouvons sélectionner les meilleures places.

Les derniers finiront dans la salle des moteurs. Nous siégeons sur des sièges de voitures fixés sur de fines planches de bois posées à-même le sol. Nous attendons l’arrivée d’un car chargé de touristes ayant réservé leur traversée par une agence. Ils arrivent, en majorité des jeunes anglais. Certains ont eu le temps d’acheter leur réserve de bière. Pourtant c’est quasiment la seule chose vendue à bord. 12h30, l’heure du départ a enfin sonné. Rapidement, des paysages incroyables nous entourent. Le Mékong, majestueux, nous offrent des deux côtés de ses rives un paysage montagneux et tropical à couper le souffle. Des enfants se baignent et nous saluent, des pêcheurs installent leurs filets et leurs cannes à pêche. Et nous, nous n’avons qu’une seule chose à faire. Admirer.


Après 5h30 de traversée dans une ambiance festive, nous débarquons à Pakbeng, une ville créée pour l’occasion. Nul besoin de rechercher une guesthouse, elles viennent à nous. A peine débarquer du bateau, les tenanciers attendent le flux quotidien de touristes. Leurs jeunes filles en tête nous abordent grâce à leur rudiment d’anglais. L’école ça sert ! La première proposée fera l’affaire.

9h du matin, départ pour une seconde journée de traversée sur un autre bateau du même acabit. Les Anglais sont toujours aussi en forme et bruyants. Les paysages sont certes toujours aussi magnifiques, mais à la fin ça devient vraiment lassant. Vivement

l’arrivée. 7h plus tard, le bateau accoste enfin. Là encore, « business is business ». Depuis quelques années, fini l’arrêt à Luang Prabeng, mais plutôt 10 km en amont. Tuk-tuk encore une fois obligatoires. Les prix sont affichés et il faut même acheter des tickets. Arrivés en ville, et n’ayant pas trouvé notre bonheur sur internet, trop cher, nous partons à la chasse d’un hôtel. Je compte bien sûr sur les talents de négociatrice de Sarah. Mais nous ne sommes pas en position de force. La plupart des établissements étant quasi complets. Après plusieurs échecs, complets ou plus chers que notre cible, nous trouvons un charmant petit hôtel, bois verni au service d’une architecture léchée, dans le plus pur style de la ville, classée au patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO. Son responsable tout fier et sûr de son coup nous montre son ultime chambre libre et tout confort (climatisation, eau chaude, TV). Sarah réussit à lui faire diviser par deux son prix initial. Enfin l’heure d’un repos bien mérité.


Ville pleine de charme bordée par le Mékong, Luang Prabeng ne semble vivre que par et pour le tourisme. Cela donne toujours une impression désagréable. Pendant ces quatre jours nous apprendrons surtout que le Laos a été en proportion le pays le plus bombardé au monde au XXème siècle. Quelques 80 millions de bombes actives jonchent ses sols et ralentissent son développement en rendant inexploitables de nombreuses terres cultivables. Elles tuent ou blessent également plus de 300 Laotiens chaque année. Enfin, chacun sa guerre, visas en poche pour le Vietnam nous reprenons la route en direction du Vietnam. Deux jours de route nous attendent.


Nous voyageons dans un mini-bus pouvant contenir a priori une vingtaine de passagers. Ça c’est en théorie. Au fur et à mesure du trajet celui-ci, quasi plein au départ, ne cesse de se remplir de personnes et de colis. Un mix entre les « car Macron » et UPS en quelque sorte. La première partie de la route jonchée de nids de poule nous fait passer quelques sueurs froides. Nous constatons également sur le chemin la mainmise de la Chine sur le nord du Laos. Tous les chantiers aperçus sur le bas-côté, un immense barrage hydraulique en particulier, sont menés par des entreprises de l’empire du milieu. Oudomxay, la ville où nous nous arrêtons est peuplée pour moitié par des Chinois. Il faut dire que le gouvernement chinois offre 100 000 $ à ses compatriotes pour s’installer au Laos. La stratégie est on ne peut plus claire. Le second jour de voyage se déroule à peu près dans les mêmes conditions et après le rapide passage de la frontière nous débarquons au Vietnam dans la tristement célèbre ville de Dien Bien Phu.