La descente vers San Pedro de Atacama est très rapide. Pas de virages, une descente très impressionnante à vive allure. En moins d’une heure nous sommes dans la ville, l’une des plus touristiques du pays. Bienvenue dans un pays riche où il faut compter le double par rapport aux pays andins pour se loger. En dortoirs ! Pas le choix, on le savait. Heureusement nous sommes hors saison, nous pouvons un peu négocier. Nous recroisons en ville nos deux compères, Aïchatou et Ruben, sur leur téléphone à chercher un hôtel. Aïchatou qui voyage depuis six mois en Amérique du Sud opte pour notre auberge de jeunesse, apparemment la moins chère de la ville. Ruben, en vacances, préfère un établissement plus « luxueux ». Repos cet après-midi.


Journée vélo ! Ça nous change de l’Asie, nous louons de superbes VTT flambants neufs. Le casque et le gilet jaune, obligatoires, nous donne un style d’enfer. A peine 10 km pour rejoindre l’entrée du désert et pénétrer dans la Vallée de la lune. La route très escarpée nous oblige à descendre régulièrement de nos montures. Plusieurs points de vue au fil du parcours nous permettent d’admirer ce décor plutôt martien de dunes rouges blanchies par le sel. La température commence à grimper. La route du retour nous paraît interminable, enfin surtout à Sarah.


Journée marche ! Une petite balade proche de l’hôtel pour découvrir des ruines sur une montagne. Palpitant, n’est-ce pas ? Arrivées sur place nous renonçons. De plus je me sens nauséeux depuis le petit-déjeuner. Nous restons tranquillement à l’hôtel. C’est dimanche, journée foot en perspective, enfin pour moi.


Le soir nous observons les étoiles chez un astrophysicien français installé dans la région. Pendant près de deux heures, dehors dans un froid polaire, nous observons des milliers d’étoiles à l’œil nu. Les explications sont certes intéressantes mais elles font plutôt office de remise à niveau. Ça va vraiment de moins en moins bien de mon côté. Au milieu des explications je me dirige discrètement vers la maison et la salle de bain, très chic par ailleurs. Je vous épargne les détails. Je ressors, on passe à l’observation au télescope. La soirée se termine, à l’intérieur, sur une séance de question-réponses autour d’un chocolat chaud. Je passe mon tour. Je m’endors. Nous rentrons, il est près d’une heure du matin.


Mon état est stable, même si je ne peux toujours rien avaler. Nous reprenons tout de même la route. Nous choisissons de faire du stop. Pratique apparemment courante au Chili nous décidons de faire la route vers Valparaiso, soit 1 600 km, en stop. Nous sortons de la ville pour se poster à l’endroit le plus stratégique. La chance nous sourit. Au bout de cinq minutes le bus qui fait la liaison avec la ville la plus proche nous prend en stop. Incroyable ! Il ne nous fait pas payer. Et une heure plus tard il nous arrête au meilleur endroit possible pour poursuivre notre route vers Antofagasta. C’est vraiment notre jour de chance. Un camion stationné sur le bord de la route est prêt à repartir. On lui demande s’il peut nous emmener. Pas de problème. Du désert à perte de vue. De mon côté je vais mieux et mange un bout de pain. Erreur, je reste cloué au lit le reste de l’après-midi.


Une bonne nuit de sommeil plus tard je retente ma chance sur le petit-déjeuner, compris dans le prix de la chambre. Ça a l’air de passer. Antofagasta, ville côtière, nous permet de retrouver la civilisation. Nous profitons des soldes de fin d’hiver pour faire quelques achats pour la Patagonie. Je remange un peu le midi. Nouvelle erreur !


Ce n’est toujours pas la grande forme. Nous repartons tout de même. Je mange un peu. Encore une erreur ! Nous sortons de la ville. Ça ne va vraiment pas. Le petit déjeuner repart. De plus personne ne s’arrête. Une heure d’attente avant qu’un camion nous prenne et nous dépose quelques kilomètres plus loin sur la route principale. Nous ne sommes pas seuls à faire du stop. Nous patientons encore une heure avant de trouver notre samaritain. Je souffre de mon côté. L’une des pires journées de ma vie. On quitte enfin le désert. On longe la côte Pacifique. Notre chauffeur s’arrête manger. On se contente d’un thé, pour Sarah, tandis qu’il me prépare une infusion spéciale pour me soigner. Nous arrivons à Caldera. Il fait nuit. Il faut trouver un hôtel. Nous parcourons toute la ville pour trouver le meilleur rapport-qualité prix. On trouve une chambre très confortable avec salle de bain privative. Une première depuis un petit moment. Je mange une banane.


Je me sens mieux au réveil. La tisane a fait son effet. Je revis ! Retour sur la route principale pour poursuivre notre marche vers le sud. Une heure d’attente avant qu’un camion s’arrête. Nous pénétrons dans le désert fleuri. Nous sommes vernis, cela ne dure que quelques semaines dans l’année. Des fleurs violettes partout. C’est d’autant plus joli que nous n’avons vu que du sel, de la pierre et du sable depuis deux semaines. Nous passons la soirée à La Serena, une des principales stations balnéaires du Chili.


Nouvelle journée de stop pour rejoindre la région de Valparaiso. Assez rapidement un chauffeur poids lourd s’arrête. Il nous dépose à une trentaine de kilomètres de notre destination, Con-Con. Le trafic est dense. Une voiture finit par s’arrêter après trente minutes. Enfin arrivés. Nous avons réussi notre objectif de tout parcourir en stop.


Con-Con ville côtière très chic située juste au nord de Vina del Mar et de Valparaiso. Amadeo et sa sœur, jeunes étudiants, nous reçoivent pour trois nuits dans leur très sympathique appartement. Une grande chambre et salle de bain privative avec vue sur le Pacifique nous attend. C’est le grand luxe. Ils sont originaires de Patagonie, où vivent encore leurs parents. Amadeo, 20 ans, finit sa licence en tourisme. Il est ultra motivé pour apprendre le Français et surexcité car nous sommes ses premiers couchsurfers.


Intrigués par la forte présence partout dans le pays de saucisse type Knaki, Amadeo nous explique que ça provient d’immigrés allemands débarqués au début du 20ème siècle au Chili. Le rayon qui leur est consacré dans les supermarchés est aussi grand que celui des fromages en France. Le principal plat de cuisine rapide au Chili est le completo. Un hot-dog accompagné d’avocat écrasé, le fruit phare du pays, et de diverses sauces. Entre nous, ça n’a pas un intérêt fou.


Nous passons notre première journée à Valparaiso, célèbre pour abriter l’une des demeures de Pablo Neruda, la fierté du Chili. Nous visitons La Sebastiana. Ça a de la gueule. On se verrait bien y habiter. La maison de quatre étages surplombe la mer et offre une vue sur toute la ville. Facile d’être inspiré dans ce cadre de vie. Sinon, Valparaiso, ville à l’origine portuaire a réussi sa mutation après la construction du canal de Panama qui a modifié le parcours des navires. Il y est très agréable de s’y promener malgré ses rues ultras pentues.


Nous consacrons notre deuxième journée à Vina del Mar. Plus chic mais moins intéressante que sa voisine Valparaiso. Nous nous contentons d’une balade au bord de mer.


Sarah prend place au fourneau ce soir, pour remercier nos hôtes. Elle prépare des escalopes de poulet à la crème et aux champignons. Pendant ce temps-là je prépare la pâte à crêpe, puis donne un cours de prononciation à Amadeo. En retour il veut faire de même pour moi en Espagnol. Difficile de refuser même si j’avais prévu de regarder Monaco-Marseille. Finalement vu le résultat, ce n’était pas plus mal. Ils se régalent du plat de Sarah et se goinfrent avec les crêpes. Une vraie réussite !


Nous prenons le bus pour Santiago, on l’a bien mérité. Avant de s’envoler pour la Patagonie nous faisons nos provisions dans la capitale chilienne pour les deux semaines à venir. Sarah trouve une magnifique polaire rouge d’occasion. Nous sommes parés.


5h30, dans le froid, nous nous dirigeons vers l’aéroport (c’est vraiment fatigant ce tour du monde). Ça y est 12h00, nous sommes en Patagonie chilienne dans la ville de Punta Arenas, la plus grande du coin. Nous nous dirigeons vers une auberge de jeunesse recommandée par le Routard. Eduardo son propriétaire, très chaleureux, est très surpris de nous voir. « Vous êtes perdus ? ». En effet, la saison n’a pas encore commencé en Patagonie et les touristes se font rares.

Premier constat, le chauffage, ils connaissent en Patagonie. La température n’est pas si terrible néanmoins, autour de 5°C et le soleil est au rendez-vous.


Dès le lendemain matin, nous reprenons la route. Nous allons tenter l’incroyable défi, vu la saison, de nous déplacer en autostop. Nous commençons à être bien rôdés. Notre espagnol toujours pas en revanche, surtout que les Chiliens parlent très vite et n’articulent pas. Nous sortons de la ville. Il y a un peu de trafic. Un premier véhicule nous dépose au niveau de l’aéroport. Beaucoup moins de trafic. Un second véhicule nous abandonne 40 km plus loin. Encore moins de trafic Le vent se lève. Une heure d’attente avant qu’un camion daigne enfin s’arrêter. Nous arrivons en fin d’après-midi à Puerto Natales. Bord de lac, montagne encore enneigée, ça c’est la Patagonie !


La ville est très charmante. Amadeo nous avait donné l’adresse de l’hôtel de son cousin. Nous y entrons. Personne. On patiente 5 minutes toujours rien. On part à la recherche d’un autre logement. On finit par en trouver un qui ne paye pas de mine. On a de la chance une compagnie de bus a repris la route le jour même pour le parc national de Torres del Paine. Toutefois, un seul départ à 7h du matin et un retour à 14h30. Trop court pour faire la principale randonnée du parc. Ne souhaitant pas camper dans le parc, nous ne prenons que l’aller. On trouvera bien un moyen de rentrer.


Levés à 6h, petit déjeuner, habillés bien chaudement, nous montons dans le bus. Nous arrivons à l’entrée du parc à 9h. Petite présentation du parc et des consignes de sécurité. Nous ressortons. Un couple de Français, qui démarre leur tour du monde, s’inquiète. « Mais on n’a pas payé les entrées ». Ah les débutants, nous ça ne nous inquiète mais alors pas du tout. La jeune fille retourne à l’accueille demander. Elle ressort. « Pas d’électricité, pas de tickets. C’est gratuit aujourd’hui ». On se met en route, 32 km aller-retour nous attend. Un véritable défi si on espère rentrer avant la nuit. Au bout de 2 km sur une piste de terre qui amène au véritable début du parcours, d’autres marcheurs arrêtent un 4x4, nous en profitons pour monter avec eux. 5 km de marche et une bonne heure d’économisés. Les choses sérieuses commencent. Ça monte, ça descend, beaucoup de pierres et de roche sur le chemin. Régulièrement, nous retirons une couche de vêtement. Le temps est idéal, ensoleillé, pas de vent, la vue est totalement dégagée. Le dernier kilomètre arrive, le plus dur. Une montée continue, d’abord sur le cours d’eau asséché, au milieu des roches puis dans la montagne enneigée et glacée. Près d’une heure pour le parcourir. Mais quelle vue ! Les trois « Torres » surplombent une petite lagune glacée. Ça valait la peine de souffrir. Il est déjà 13h30. Il faut refaire les 16 km pour revenir à l’entrée du parc et espérer trouver une voiture. On ne s’attarde pas trop longtemps. Surtout que malgré la saison les touristes sont déjà en nombre. La descente est casse gueule. On se laisse glisser sur les fesses sur la neige glacée. On rattrape un groupe d’Américains sur la deuxième partie de la descente. Ils n’avancent pas. Ils finissent par s’arrêter pour nous laisser passer.

Et là c’est le drame, Sarah trébuche ! Son pied gauche se bloque, la cheville se tord. Malgré la douleur, il n’y a pas d’autre choix que de reprendre la route. Il faut avancer tant que la cheville est encore chaude. 16h30 nous parvenons au premier parking. Deux voitures sont garées. Un homme arrivé juste avant nous se dirige vers l’une d’entre elles. Notre chance ? On lui demande s’il peut nous ramener sur Puerto Natales. Il est un peu surpris sur le moment. Mais pas folle la guêpe. Il est guide dans le parc et nous propose de nous raccompagner mais pour le prix du bus. On accepte. De la glace, la cheville de Sarah a beaucoup gonflé.


Sarah ne peut pas poser le pied au sol. On file aux urgences. C’est une entorse modérée d’après le médecin. Il recommande 10 jours de repos.


Après deux jours au chaud dans notre auberge de jeunesse où nous sommes les seuls clients, nous repartons sur les routes en stop. Et ça s’annonce compliqué aujourd’hui. Nous devons passer la frontière argentine. Deux routes sont possibles et difficile de savoir laquelle est la meilleure. Nous avons reçu des conseils contraires. Deux heures pour enfin parvenir à sortir de la ville. Un premier véhicule nous dépose devant un poste frontière de sortie du Chili. On demande à la première voiture qui s’y arrête de nous prendre. Ils acceptent, mais ne vont pas tout à fait dans notre direction. Nous passons la frontière argentine quelques kilomètres plus loin. Ils nous déposent à mi-chemin, un peu au milieu de nulle part. Il reste 150km à faire. Le vent souffle. Nous patientons une heure avant que deux jeunes s’arrêtent. Un peu plus d’une heure plus tard nous sommes dans le centre d’El Calafate. Mission accomplie !


Encore une fois nous sommes les seuls clients de l’auberge. Debout à la fraîche, nous descendons prendre le petit déjeuner. La cuisine se trouve dans un bâtiment annexe. Les clés de l’auberge traînent sur la porte. Le préposé au petit déjeuner n’est pas encore réveillé. On ouvre la cuisine. Toujours personne. On fouille dans les placards. On se débrouille. Nos sacs sur le dos nous nous dirigeons vers notre bus pour aller rejoindre le parc national Los Glacieres. Il se réveille et s’excuse. Une heure de route pour atteindre le parc et le Perito Moreno, le glacier le plus grand du monde et par conséquent le plus touristique de la région. 250 km², 30 km de long, 170 m de haut dont 74 m immergé. Un bien beau bébé. C’est aussi un des rares glaciers sur Terre encore en expansion. Des passerelles sur plusieurs kilomètres permettent de l’admirer sous toutes ses coutures.


Du stop, du stop, encore du stop. Nous continuons vers le nord et El Chalten, la Mecque du trekking. Un Français, en visite dans la région pour parcourir un marathon, puis un jeune couple d’Argentins nous y emmènent. La ville est située directement dans le parc national, presqu’aux pieds des montagnes. La vue est dégagée, nous pouvons déjà contempler le Fitz Roy et le Cerro Torre. On pourrait presque repartir.


Nous prenons possession de notre logement. Une véritable ville fantôme. La plupart des hôtels et commerces sont fermés. Une petite randonnée l’après-midi pour se mettre en jambes pour les deux prochains jours nous amène au pied d’une cascade. Jolie sans plus. Le vent est vraiment terrible ici. La cheville de Sarah tient.


Le lendemain matin nous partons pour admirer de plus près le Cerro Torre. Après moins de trois heures de marche assez tranquille en forêt nous atteignons la Laguna Torre. Malheureusement, le vent ne s’est pas encore levé pour chasser les nuages. Nous rentrons un peu désappointés.


La neige tombe depuis l’aube. Nous patientons. Pas de grande randonnée aujourd’hui. Nous partons tranquillement en début d’après-midi vers la Laguna de Los Tres. Arrivés après une heure et demie de marche devant la lagune nous pouvons nous asseoir sur un banc en bois et contempler le Fitz Roy. Voilà, nous avons terminé nos excursions en Patagonie. Nous nous donnons trois jours pour revenir au point de départ, Punta Arenas. Trois jours de stop plus tard sans encombre nous retrouvons notre auberge de départ et Eduardo tout content de nous revoir.


4h de vol pour retrouver Santiago. Ken et Pamela nous accueillent pour cette dernière soirée au Chili. Ken, japono-chilien, et Pamela, suisse-alémanique, nous font terminer en beauté notre séjour au Chili.